29 octobre 2009, aux environs de St André les Alpes (04), Haut Verdon :
Au bivouac sur un terrain encaissé au bord d’une rivière boisée, mes allées et venues au petit matin givré foulent le sol végétal. En attendant le soleil qui peine à s’élever derrière la montagne, je tente de me réchauffer en m’activant au petit déjeuné. Je marche du van à la rivière et récupère de l’eau pour le thé.
Je piétine autour des cendres refroidies de la veille, quand, soudain je vois au sol les plantes couleurs d’automne aux contours de givre : je découvre leur beauté et leur condition précaire. Je décide de faire quelques clichés et observe la finesse de ce parterre végétal que jusque là mes pieds rustres ignoraient. Après quelques compositions photographiques au motif de ces délicates mais vaillantes plantes glacées, je reprends la préparation du thé, encore seule source de chaleur possible à cette heure. Et je remarque et observe mon nouveau comportement : désormais mes pas se font délicats et précis dans leurs appuis pour respecter cette flore dont l’existence, la beauté et le courage sont venus à ma conscience. Me voilà maintenant à faire détours et pas de chat pour rejoindre la rivière car sous mes pieds, je le sais désormais, des êtres luttent pour leur survie et pour m’offrir la verdure que je suis venu chercher.
C’est pour moi une parfaite métaphore de notre rapport au monde : vivre sans conscience jusqu’à poser son regard et, forcément ému par la beauté et la fragilité du vivant, porter toute son attention à ce qui compte réellement.
Extrait du carnet de bord. Lionel Le Guen